Sauvetage de la maison alsacienne du 15 rue de Dunkerque

MAISON ALSACIENNE : STATU QUO DEPUIS 2009

 

 

Nos lecteurs se souviendront qu’en 2009 nous avions, conjointement avec la Société des Amis du Vieux Strasbourg, formé un recours gracieux tendant à ce que cette jolie maison à colombages du 15 rue de Dunkerque à Strasbourg ne soit pas démolie tel que cela était décidé, recours accueilli favorablement par M. le Maire.

 

Nous avions proposé de l’accueillir dans notre quartier, à un emplacement adéquat sur les berges du bassin des Remparts. Toutefois le Port autonome avait pris une autre décision, celle de démonter et remonter la maison à l’horizon 2011 sur le site du Heyritz, au bord du bassin de l’Hôpital, en la réhabilitant en capitainerie d’une halte pour bateaux de plaisance.

 

En 2011, le projet n’ayant pas évolué, l’ADIQ avait fait part au Port autonome de son inquiétude quant aux risques de squat et d’incendie de cette maison inoccupée. Le directeur général nous avait répondu que la relocalisation prenait un peu de retard mais que les services du Port s’assuraient régulièrement qu’aucune dégradation n’intervienne sur la maison.

 

A ce jour, la maison n’a toujours pas été démontée ; l’ADIQ a donc demandé par écrit en octobre au directeur général du Port si le projet de remontage au Heyritz était toujours d’actualité, ou dans la négative ce qui était envisagé quant au devenir de la maison. Nous tiendrons nos lecteurs au courant de la réponse.

 

Jean-Luc DÉJEANT

Novembre 2013

 

CRAINTES POUR LA MAISON ALSACIENNE

(mai 2011)

Nos lecteurs se souviendront de l’action que l’ADIQ avait menée en partenariat avec la Société des Amis du Vieux Strasbourg en 2009 pour sauver la maison alsacienne du 15 rue de Dunkerque qui faisait l’objet d’un permis de démolir.

Nous avions alors suggéré que cette jolie maison à colombages, si elle devait être enlevée, soit remontée dans notre quartier, sur les berges du bassin des Remparts, où elle pourrait s’intégrer au mieux dans le projet municipal d’aménagement de cet espace.

Notre action s’était conclue, suite à l’entremise de M. le Maire en faveur du sauvetage, par la décision du propriétaire, le Port Autonome de Strasbourg, de remonter la maison sur le site du Heyritz en usage de capitainerie d’un port de plaisance.

Nous nous étions félicités de cette solution qui, si elle ne nous permettait pas d’accueillir la maison dans notre quartier, assurait sa pérennité, ce qui est le plus important.

Or à ce jour la maison n’a pas été démontée. Ce statu quo nous est apparu risqué pour la pérennité du bâtiment. Il est en effet une équation qui se vérifie fort souvent : maison inoccupée = squat = incendie.

De plus la situation isolée et l’environnement de cette maison se prêtent particulièrement à ce type de risque. Il nous a d’ailleurs déjà été signalé des fumées de grillades à proximité immédiate.

C’est pourquoi nous avons fait part de nos craintes par écrit au Directeur Général du Port, M. Jean-Louis Jérôme, à qui nous avons ajouté que dans l’occurrence malheureuse d’un sinistre nous serions ennuyés d’entendre dire au final que, compte tenu des dégâts subis et des dangers encourus, il est devenu nécessaire de raser la maison.

Nous lui avons également rappelé que nous avions suggéré un lieu adéquat pour accueillir cette maison dans notre quartier.

Le Directeur Général nous a aimablement répondu en mars 2011 qu’effectivement la relocalisation de la maison prenait un peu de retard car ce projet nécessitait des réflexions sur le positionnement et le rôle futur de la maison, et des modifications des documents d’urbanisme. M. Jérôme précisait que les services du Port s’assuraient régulièrement qu’aucune dégradation n’intervienne sur la maison. Dossier à suivre donc.

Jean-Luc DÉJEANT, Quinze mai 2011

 

 

MAISON ALSACIENNE (suite)

(mai 2010)

Dans le Quinze de novembre 2009 nous vous informions du sauvetage de la maison à colombages de la rue de Dunkerque, suite au recours gracieux conjoint de l’ADIQ et de la Société des Amis du Vieux Strasbourg.

A la suite de l’article, deux aimables lectrices, Madame Christiane Bacquet et Madame Liliane Lucas, nous ont écrit chacune de leur côté qu’elles avaient eu dans leur jeunesse une camarade de classe, Geneviève Reschwein, qui habitait alors la maison voisine de la maison à colombages. Geneviève était connue pour venir à l’Institution Sainte-Clotilde… en barque !

Nous avons donc pris contact avec Madame Reschwein qui nous a confirmé le moyen de transport par eau. La navigation vers l’école consistait à traverser le bassin des Remparts en barque à rames jusqu’au droit de la rue du Général Conrad, d’où l’écolière terminait le chemin à pied.

Et la traversée n’était pas sans risques, car à l’époque – nous sommes entre 1945 et 1954 –, le port était fréquenté par de nombreux bateaux et péniches. Au retour de Sainte-Clotilde, Geneviève criait depuis la rive afin que son papa revienne la récupérer à la rame !

Le papa était constructeur de petits bateaux et son atelier jouxtait la maison à colombages (il est aujourd’hui occupé par l’association des Castors d’Alsace). Des bateaux en bois bien sûr, qu’il construisait pour le sauvetage, la pêche, les joutes, et même pour le lac de l’Orangerie qui se payait encore le luxe de ne pas accueillir les coques de matière plastique.

Il n’y avait alors dans ce secteur que ces deux maisons d’habitation. Le long de la rue de Dunkerque, côté bassin, fonctionnaient des industries comme la Franco-Suisse (aujourd’hui Navalsa) ou les Potasses d’Alsace (aujourd’hui Somes). En revanche côté intérieur de la rue de Dunkerque, ni usines ni lycée Pierre Brousse, mais la brousse ! Plus exactement une végétation de type forêt du Rhin irriguée par la présence d’un bras d’eau aujourd’hui comblé, avec ses arbres indigènes, ses lianes et ses fleurs sauvages que Geneviève partait cueillir aux beaux jours.

Pour aller visiter ses amies au quartier des Quinze, rien de plus simple, la barque est là. Geneviève se rendait également souvent chez ses voisins de la maison à colombages, où elle a bien connu trois familles qui s’y sont succédées (Knorr, Goetz et Schnorr), dont le chef était systématiquement employé du port affecté au fonctionnement de l’écluse. Elle n’a pu en revanche nous confirmer si la première vocation de ladite maison à colombages lors de sa construction à la fin du 19e siècle était bien de loger un passeur, comme nos recherches le laissent penser.

Mai 2010

 

MAISON A COLOMBAGES : SAUVÉE !

(novembre 2009)

 

C’est par les DNA que nous apprenions, fin mai 2009, que la jolie maison dont on distingue les colombages depuis le bassin des Remparts, était promise à la démolition.

Un permis de démolir avait été accordé à son propriétaire, le Port Autonome de Strasbourg, aux fins de créer de la place pour les futurs locaux des Voies Navigables de France (VNF).

Démolition programmée

Et il y avait urgence à agir, car renseignements pris auprès de l’administration du Port, la démolition était prévue pour le mois d’août…

Ce qui nous a sensibilisés de prime abord a été la perte patrimoniale. Trop de maisons à colombages ont disparu de l’agglomération. Jugées trop vétustes, peu confortables, sombres, voire trop populaires, certaines ont été victimes de leurs propriétaires, quand elles n’ont pas été la proie des promoteurs.

C’est que le charme qui se dégage de ces habitations, et le parti que l’on peut en tirer, sans parler de leur valeur architecturale, n’ont pas toujours été bien perçus. Des initiatives exceptionnelles, au premier rang desquelles l’Ecomusée d’Alsace à Ungersheim (68), ont concouru à cette prise de conscience du plus grand nombre.

Cependant, cette maison étant très proche certes de notre quartier, mais ne s’y situant pas, l’ADIQ n’avait pas a priori de motif d’action contre sa démolition, et aurait pu se résigner à verser une larme sur les pierres mises à bas par le godet impitoyable de la pelle mécanique.

L’idée : la remonter dans le quartier

C’est là qu’une idée nous est naturellement venue. S’il fallait absolument que cette bâtisse soit démolie, il y avait un lieu tout prêt à l’accueillir dans notre quartier : l’espace situé entre l’ancien lieu d’amarrage du bateau-restaurant l’Elégant et le bunker qui se trouve au virage à la jonction de la rue du Général Conrad avec la rue Boussingault.

Avec cet emplacement le contexte historique aurait été préservé, la maison à déplacer se trouvant juste en face, sur l’autre rive du bassin des Remparts, au 15 rue de Dunkerque.

Et surtout, cette pittoresque demeure pouvait devenir le cœur battant de ce lieu, situé le long du bassin des Remparts, qui demande à être réanimé pour retrouver l’attrait et l’agrément qui étaient les siens avant-guerre (voir notre article sur les berges du bassin des Remparts dans le présent numéro).

Accessoirement, le règlement du plan d’occupation des sols permettait cette implantation sous condition d’une destination publique.

Les grands esprits se rencontrant, notre réflexion s’engagea en même temps exactement que celle de l’honorable Société des Amis du Vieux Strasbourg et de Pierre Deutsch, président de sa commission du patrimoine, infatigable et très compétent défenseur des vieilles pierres de notre cité.

Recours auprès du Maire

De cette réflexion commune est né un recours gracieux signé conjointement du président de l’ADIQ et du président des Amis du Vieux Strasbourg, Bernard Vogler, et adressé dans les formes, un mois après l’article DNA, à M. le Maire Roland Ries, avec copie à la Présidente et au Directeur Général du Port Autonome de Strasbourg.

Dans ledit recours gracieux nous faisions valoir en quoi ce permis de démolir apparaissait dommageable, s’agissant d’une maison alsacienne à colombages présentant un intérêt patrimonial et historique indéniable.

Nous relevions certaines particularités de l’édifice, comme un faîtage percé de lucarnes et orné de rames entrecroisées, ou des façades à colombages ouvragés.

Nous suggérions deux solutions. La première consistant à conserver en place la maison, qui pouvait abriter des locaux à destination administrative ou sociale pour le personnel de VNF ou du Port Autonome.

La deuxième, dans le cas où les exigences du réaménagement du secteur rendraient nécessaire le démontage de ce bâtiment, consistant à remonter le bâtiment dans les abords portuaires proches, soit à l’emplacement décrit plus haut.

Nous concluions qu’en l’espèce, intérêt général et intérêt particulier, loin de s’exclure l’un l’autre, pouvaient aller de pair.

Le 4 juillet, votre serviteur défendait à nouveau ce projet auprès du Maire en visite dans notre quartier. Nous avions le plaisir d’entendre le premier magistrat nous déclarer qu’il était d’accord quant au fait que la maison devait être préservée d’une manière ou d’une autre.

Décision favorable

Enfin le 1er septembre les associations étaient invitées par le Directeur Général du Port Autonome, M. Jérôme, à une visite de la maison, en présence de M. Jund, Adjoint au Maire en charge de l’urbanisme.

 

Il nous était alors annoncé que le Port Autonome avait finalement décidé de démonter et remonter la maison sur le site du Heyritz lui appartenant, dans le cadre de la restructuration de l’endroit, planifiée avec la Ville qui est propriétaire contiguë.

La réimplantation de la maison au Heyritz plutôt que dans notre quartier présente pour la Ville l’intérêt de ne pas supporter le coût de l’opération, assumé dans ce cas par du Heyritz qu’est le Port Autonome.

Pour nous c’est certes un regret de ne pas voir notre quartier bénéficier d’un tel apport patrimonial. Mais cette déception s’efface devant la satisfaction de voir sauvée cette maison remarquable, et de savoir qu’elle débutera une seconde vie au bord de l’eau.

En l’occurrence « notre » maison deviendra, d’ici deux ans, la capitainerie d’un site d’accueil de bateaux de plaisance.

Même si nous n’avons pu obtenir satisfaction pour le quartier, c’est au final une action associative des plus positive. On se félicitera de la collaboration fructueuse avec les Amis du Vieux Strasbourg. On remerciera la présidence et la direction générale du Port Autonome. Et l’on ne peut que saluer dans ce dossier l’attitude d’ouverture de nos édiles et du premier d’entre eux.

Jean-Luc DÉJEANT - Novembre 2009

Avec nos remerciements à Pierre DEUTSCH, de la Société des Amis du Vieux Strasbourg

 

 

MAISON ECLUSIÈRE OU MAISON DU PASSEUR ?

Le sauvetage de cette maison a été l’occasion de faire des recherches sur son histoire.

Elle est usuellement dénommée « maison éclusière ». Soit le logement d’un éclusier, l’éclusier étant le gardien d’une écluse, en charge de son bon fonctionnement.

Cependant l’absence d’écluse à proximité de la maison pose question. En effet l’écluse nord, au bord du quai Jacoutot, est éloignée et possédait à l’époque sa propre maison éclusière.

Mais la configuration de ce secteur du port a évolué au 19e siècle et au début du 20e. Y avait-il une écluse à cet endroit avant que soit creusé le canal dit de dérivation, c’est-à-dire l’actuel bassin des Remparts, à la fin du 19e siècle ? Rien n’est moins sûr, ce qui met à mal la vocation éclusière de la maison.

Nous nous sommes naturellement mis en rapport avec le Port, mais leurs archives sont peu fournies pour cette époque, mis à part quelques plans intéressants et deux lettres en allemand gothique qui nous ont été transmis.

Nous avons également visité la brigade de gendarmerie fluviale, dont l’intérêt pour ces questions historiques doit être salué.

Nous nous sommes enfin rapprochés de l’association du Naviscope Alsace, dont le bateau-musée est amarré au bassin des Remparts, et qui a pour mission de garder la mémoire de ce qui concerne le Rhin et la navigation fluviale à Strasbourg.

Une question qui s’est posée est relative à la pratique du canoë, déjà en vogue sur les canaux. La maison pouvait-elle être une sorte de club de canoë de l’époque ? La présence de rames entrecroisées ornant le faîte du toit de la maison aurait-elle évoqué ce sport ?

Une hypothèse plus fiable est qu’il se soit agi de la maison d’un passeur. Selon l’association du Naviscope Alsace, qui a mis à contribution un érudit Allemand intéressé par l’histoire du Port, il y avait entre la maison et le quai Jacoutot une traversée du canal (« Ruderbootfähre ») effectuée semble-t-il par une embarcation ou un bac ; la maison pourrait alors avoir été celle du passeur.

Ici aussi les rames trônant sur le toit rappelleraient-elles l’usage d’une embarcation par le locataire du lieu ?

D’autres éléments sont encore à vérifier pour être en mesure de confirmer la vocation première du lieu, qui quoi qu’il en soit avait un rapport avec l’eau. Ainsi à proximité se trouvait un bassin de flottage (« flosshafen »), aujourd’hui disparu, destiné à stocker le bois de flottage descendant des forêts. Un détail : la maison comportait à l’arrière une petite écurie.

Le temps nous a manqué pour mener complètement ces recherches ; nous tâcherons de vous donner plus de certitudes dans notre prochain numéro.

 

Novembre 2009