Le Nôtre, prince des jardins

En 1613, au siècle de La Fontaine, Molière et Racine, naît en face des Tuileries André Le Nôtre. Il étudie au collège de Clermont, futur lycée Louis-Le-Grand. Vers l’âge de 16 ans, il commence un apprentissage de six ans au Palais du Louvre dans l’atelier de Simon Vouet et se lie d’amitié avec Charles Le Brun.

Devenir peintre ou jardinier ? C’est la tradition familiale qui l’emporte. Jean son père et Pierre son grand-père oeuvrent au Jardin des Tuileries et André a 24 ans lorsqu’il prend la relève comme premier jardinier du roi. A l’âge de 35 ans, il devient dessinateur des plants et jardins du roi et douze ans plus tard, contrôleur des bâtiments.

Nicolas Fouquet, surintendant des finances du roi, lui demande de dessiner les jardins de Vaux-Le-Vicomte. Le Nôtre a alors 43 ans et cette oeuvre sera sa première gloire. Invité par Fouquet lors d’une fête fabuleuse et démesurée à Vaux, Louis XIV, humilié, fait arrêter Fouquet. Il confie à Le Nôtre la réalisation des jardins du Château de Versailles. Du château de Fouquet, le roi emmène également l’architecte Le Vau, le peintre Le Brun ainsi que les entrepreneurs, les menuisiers et même les plus beaux végétaux. Pour Louis XIV, le jardinier est aussi précieux que l’architecte.

Le Nôtre a conçu les plus beaux jardins à la française du 17ème siècle. Ceux des Tuileries, Vaux, Saint- Germain, Fontainebleau, Chantilly, Saint-Cloud, Sceaux et bien sûr ceux du Château de Versailles, sont d’une modernité surprenante pour l’époque.

Ainsi les bâtiments sont ouverts sur les jardins, les terrains s’agrandissent, des perspectives sont percées vers l’horizon. Avec Le Nôtre l’eau est présente sous toutes ses formes. D’étranges machines sont inventées pour propulser l’eau des puits dans des réservoirs afin d’alimenter fontaines, cascades, gerbes, jeux d’eau qui fonctionnent continuellement ou lors du passage du roi. Les rivières sont détournées pour embarquer les invités sur des bateaux où l’on écoute des concerts au fil de l’eau.

Le buis est taillé en formes géométriques et les parterres sont des arabesques de broderie. On installe des orangers, on plante des jacinthes, des jonquilles, des narcisses et la reine des fleurs, la tulipe. En se promenant dans les jardins, on découvre de façon inattendue au détour d’un chemin, des sculptures, des fontaines, des cascades, des grottes, des bosquets ou encore des mélanges de matériaux insolites.

Le Nôtre est un homme heureux, simple et modeste, tout en devenant un puissant conseiller et ami du roi. Il est aussi un grand collectionneur, et en 1693 il offre au roi ses plus belles peintures, ce qui lui vaudra l’octroi d’une pension.

De son union avec Françoise Langlois naissent trois enfants qui partiront tous en bas âge. Sans laisser d’héritier, pas plus que de journal ou de mémoires, André Le Nôtre s’éteint en 1700, nous léguant des jardins remarquables, reconnaissables par leurs perspectives et géométries parfaites.

Nicole KAH, mai 2012

Le Nôtre à Strasbourg ?

Selon la légende locale, Le Nôtre serait le concepteur du réseau de promenades à la française, à doubles et quadruples alignements d’arbres, qui fut créé entre 1692 et 1700 entre (repères actuels) lac de l’Orangerie et Ill dans un sens, rue de la Schiffmatt et centre culturel St Thomas (Robertsau) dans l’autre. Toutefois cette paternité n’est pas établie ; ce n’est que bien plus tard qu’un plan dressé par les services de la Ville en 1805 intitulé « Plan de la promenade de Le Nôtre et de l’Orangerie » dénomme ces promenades « Grandes Allées de Le Nôtre » (elles seront détruites progressivement entre 1830 et 1895).

JL Déjeant, mai 2012