La rue Silbermann - Des facteurs d'orgues

 

Les Silbermann sont une célèbre famille de facteurs d’orgues résidant à Strasbourg au 18ème siècle.

 

André Silbermann, le père, fit probablement son apprentissage en Saxe dont il est originaire. En 1699 il vient en Alsace afin de rénover l’orgue de Bouxwiller. Il se forme – on le suppose - chez Frédéric Ring, facteur d’orgues strasbourgeois, puis chez le facteur parisien François Thierry. Il revient à Strasbourg en 1706, crée son propre style et fonde cette maison devenue si réputée.

 

Gottfried, jeune frère d’André, vient lui aussi de sa province natale faire son apprentissage et travailler auprès de lui. Jean-André, fils aîné d’André, à qui son père apprend le métier, reprend l’affaire à l’âge de vingt deux ans. Jean-Daniel, second fils d’André, rejoint son oncle Gottfried, retourné en Saxe dès 1709, où tous deux continuent à réaliser des instruments de grande qualité. D’autres membres de cette dynastie, certes moins connus, sont également formés dans l’atelier familial pour exercer ce beau métier.

 

Les orgues Silbermann, certains classés au titre des monuments historiques, sont de véritables chefs-d’œuvre et contribuent largement au rayonnement de la musique d’orgue en Alsace. André et son fils Jean-André ont réalisé une centaine d’instruments, notamment en Alsace, dont on peut décrire ici quelques exemples marquants.

 

Les orgues d’André Silbermann (1678-1734)

 

L’orgue de l’église Saint-Etienne à Marmoutier, construit en 1709, est l’un des plus célèbres d’Europe et sa première œuvre importante. Etonnamment bien conservé, avec trois tourelles, sur une tribune aux panneaux sculptés, l’instrument est complété en 1746 par son fils Jean-André.

 

Celui de l’église Saint-Maurice à Ebersmunster, construit en 1730, est une de ses dernières réalisations. Doté de cinq tourelles, il est inspiré de celui, aujourd’hui disparu, de l’église de Saint-Germain-des-Prés, conçu par un facteur d’orgues parisien. Peu modifié sur le plan musical, il permet d’apprécier l’art du talentueux facteur d’orgues.

 

Dans la cathédrale de Strasbourg, on relève la présence d’un orgue dès 1260. Dans les années 1714, André Silbermann construit un nouvel instrument en conservant le superbe buffet gothique. Il le modernise et remplace les anges musiciens par des ailerons et claires-voies baroques, ornés de feuilles d’acanthe. Souvent restauré et renouvelé, il ne subsiste aujourd’hui que peu d’éléments de l’orgue Silbermann. L’orgue actuel reconstruit par Alfred Kern en 1981 est néanmoins un instrument de très grande qualité.

 

A l’église Sainte-Aurélie à Strasbourg, l’orgue réalisé en 1718 est également l’une de ses œuvres. En 1765, l’instrument est replacé dans la nouvelle église et le buffet est repeint en blanc par la suite pour s’harmoniser avec l’ensemble. Il est l’un des rares buffets alsaciens peints de l’époque. Au fil des ans, l’orgue a subi diverses transformations sur le plan instrumental.

Les orgues de Jean-André Silbermann (1712-1783)

 

L’église Saint-Thomas de Strasbourg possède un orgue remarquable exécuté par Jean-André de 1737 à 1740. Sa facture est proche de celui d’Ebersmunster conçu par son père André. Son ample buffet de bois clair à cinq tourelles, admirablement sculpté, dégage subtilement la vue sur la rosace occidentale. Son audacieuse restauration de 1979 et son récent relevage lui rendent toute sa splendeur et mettent en valeur ses qualités artistiques et sonores.

 

En l’église priorale de Saint-Quirin, près de Sarrebourg, subsiste un authentique orgue fabriqué en 1746. L’instrument, restauré méticuleusement, est un témoin de la facture d’orgues baroques du siècle des lumières.

On peut citer celui de l’église Saint- Maurice à Soultz dans le Haut-Rhin, réalisé en 1750 dans le style classique français. L’orgue est refait dans les années 1960 en conservant les éléments encore existants de l’époque, sa disposition initiale étant fidèlement respectée.

 

Enfin l’orgue de l’église paroissiale de Molsheim, construit en 1781, est l’une de ses dernières réalisations. Restauré en 1970 dans le style de Silbermann, il a retrouvé son authenticité ; le buffet comporte des ailes sculptées ornées d’instruments de musique.

 

Les Silbermann restent l’une des plus célèbres familles de facteurs d’orgues ; ils auront marqué de leur empreinte l’art et la musique de Louis XIV jusqu’à Louis XVI.

 

Nicole KAH 

Novembre 2009